Jeu 18 Juin - 19:18
Je respire calmement.
C'est une révélation, c'est la première fois que je respire calmement en un demi siècle. Quoique, je ne suis pas si vieux. Je penche la tête devant mon miroir, m'attendant moi même à m'entendre prononcer un « Miroir, dis moi que je suis le plus beau » tellement la scène me paraît absurde. Absurde et apaisante à la fois. Je ne pourrais vous expliquer. Je sens que cette fête va remuer tant de vieux souvenirs, comme des tous récents, ça risque de péter comme une bouteille de champagne ouverte après avoir été secouée. Ou comme un mentos dans une bouteille de cola, mais c'est déjà moins classe.
J'arrange une dernière fois la mèche que j'ai attaché derrière mon cou d'une petite tresse. Je repasse une main sur les drapés tantôt fins tantôt épais, s'entremêlant avec grâce et savoir faire. A priori je ne devrai pas avoir trop froid, c'est déjà cela. Je passe en revu la ceinture de pierreries, les nombreux colliers et autres breloques qui pendent de ma tenue bleue nuit et de ses innombrables motifs dorés. Je fais un bruit du tonnerre par contre. Je crois que j'ai un peu oublié comment être discret avec ça... Ça fera tout de même l'affaire.
Puis je repasse encore tout en revu. Et encore. Ne vous imaginez pas des choses, cette petite cérémonie ne me rends pas nerveux, loin de là. Ce n'est pas une petite fête déguisée organisée par une pimbêche de Créanne, ou devrais-je même dire la pouf du Panthéon, qui va me mettre mal à l'aise. J'ai plus peur de Nathan que de cette femme. Non, c'est... Le costume. Perturbant. Je ne m'était pas vu avec depuis... Il suffit les comparaisons de temps. Sachez juste que ça remonte. Et que je ne pensais d'ailleurs jamais le remettre. Tous les motifs traditionnels tels que la bouche, le taureau, l'oiseau, les roseaux... vont sûrement faire l'effet de broderies abstraitement organisées pour la plupart des hommes. Je soupire, prenant plaisir à me mouvoir dans cet habit étrange.
On toque. Sans attendre mon accord, Nathan entre.
- Monsieur, j'ai fini les dossiers supplémentaires, je vais aller-Elle lève la tête, coupée dans son élan.
- A la fête, je suppose, fis je en me retournant vers elle.
J'y vais aussi. Je suis surpris que vous soyez resté si longtemps, je compterai cela dans vos heures supplémentaires.- Monsieur, on dirait...- Oui, c'est exactement ça.- C'est... Incroyable. Où l'avez vous eu ?- Vous disiez avoir fini ? C'est le moment pour vous d'y aller n'est ce pas ?Elle a un petit mouvement de recul, impressionnée, et acquiesce en sortant. Elle est très douée, sûrement plus que je ne le pensais. J'aurai du me méfier un peu plus mais bon, je n'en attends pas moins de mes collaborateurs, savoir identifier un rang via un costume... Elle a du faire sa thèse sur ça. Oui probablement, ça lui correspondrait bien.
J'enfile une dernière bague à mon doigt et souris.
J'en connais qui vont être surpris, là bas.
Il ne me faut pas bien longtemps pour y arriver, une telle lumière en pleine nuit, c'est essayer d'invoquer le Soleil là où il n'est plus et ça se voit. Je sens les auras d'un tel nombre de connaissances que je me dis que demain, l'infirmerie va être prise d’assaut par des élèves avec des maux de crâne. J'aperçois quelques Dieux, tels que nos deux ténébreux et le très original Enki qui a enfilé son « costume » de travail, bien vu. On ne peut manquer non plus l'espèce de freluquet qui se pavane au bras de la maîtresse de partouze d'un air sadique, j'ai nommé le grand et visiblement pas très intelligent Enlil. Qui va encore se taper l'explication ensuite, quand les petits Missionnaires viendrons me dire avec un grand sourire « Alors on peut faire la fête avec les Créannes ! C'est cool ! » jusqu'à ce qu'un ou deux se fassent décapiter à cause de leur humanisme. Fatigant.
Mais ce soir, ce sera différent. Je promets de ne m'énerver contre personne. Excepté peut-être Inanna, l'affaire du bureau m'est un peu restée en travers de la gorge. Je pousse d'une main agile un des drapés pour me glisser dans la foule, complètement incognito, fluide. Enfin, incognito, c'est sans compter sur certaines personnes présentent. En souriant, je fend la foule qui s'ouvre d'elle même sur mon passage pour aller m'accouder auprès de l'homme au masque et costard.
- T'es sacrément gonflé.- Ce n'est qu'un costume sumérien. Tu es mal placé pour parler, te ramener en habits de travail... Tu n'as pas peur des tâches ?- Tss. Ça m'étonnerait qu'ils apprécient tous le geste...- Vous êtes trop susceptibles...Je saisis une coupe au passage, du bout des doigts, observant les êtres autour de moi, dont certains se tournent vers moi, sans même qu'ils ne comprennent pourquoi. C'est amusant. Même en essayant de me cacher, ils sont attirés. Comme des papillons de nuit devant une lanterne. Je me concentre pour masquer d'autant plus mon aura, disparaître. Je m'en voudrais d'éclipser Enki, tout de même. C'est le costume, que voulez vous.
Pourtant ce ne sont que des habits sumériens.
HRP : le monde, c'est fou ! Puisque apparemment il faut mettre une image, je dirai que celle du gars endormi est assez ressemblante. Sauf pour la tête.
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