* * Azur * *
Hm, je crains que mon initiative ait offensé le jeune homme.
— …Y'a que les créannes qui t'intéresse hein ! Avoue ! Putain mais c'est pas possible d'être comme ça. Tu veux savoir ce que je connais de ce monde ?! Eh bien ma chère pour ça il faudra me pénétrer l'esprit ou me présenter tes excuses sous forme humaine.
J’aurais été sous ma forme humaine, je crois que j’aurais haussé un sourcil. Je m’intéresse aux humains, je les aime beaucoup d’ailleurs –tant qu’ils ne sont pas missionnaires-. Cependant, je ne vois pas l’intérêt de leur poser des questions sur les créannes, sur le monde des dieux. Tant qu’ils sont médiums, je considère qu’ils ne savent pas grand-chose de tout ceci, qu’au fond ils sont juste, malheureusement, les victimes de tout cela. On ne m’a jamais demandé de m’intéresser aux médiums.
Cependant, les mots pleins de reproches de cette créanne me font douter, le temps d’une seconde. Peut-être est-ce une erreur, de prêter aussi peu attention aux humains.
Mon esprit retourne vers mon corps. Je ne compte pas lui soutirer des informations par la force, ce n’est pas dans ma nature. D’autant plus qu’il a raison… mon comportement est impoli, particulièrement envers la miss. Au fond elle ne mérite pas une telle… indifférence de ma part.
Le souci réside dans le fait que rester sous ma forme animale est devenu une habitude pour moi. Une manière de me protéger, mais aussi protéger un tant soit peu mon maître et ses alliés. Parce que ma forme animale est bien moins facilement identifiable que ma forme humaine. Une jeune femme aux yeux bleus éclatants et aux cheveux blancs ne s’oublie pas facilement, n’est-ce pas ? Tandis qu’un faucon passe plus inaperçu, dans la nature du moins. De fait, quand j’en avais le choix, j’attendais de voir si la personne en face était digne de confiance ou non. Parce que la discrétion est souvent gage de survie, lorsque l’on est une créanne.
Mais il était vrai que, en revanche, je n’avais pas pris la peine de communiquer avec la demoiselle, même par l’esprit. Pour ça, je n’avais pas d’excuses.
— Il faut l'excuser, il n'est pas toujours facile.
Un faible sourire aurait étiré mes lèvres si j’avais été sous ma forme humaine.
* * * *
Neal se détourna de moi à un moment donné, avant de retourner vers les autres. Un jeune homme blond les avait rejoint, et se dirigeait maintenant vers ce que les humains appelaient une « voiture » -me semblait-il. Je battis des paupières, avant de reprendre ma forme humaine.
J’interrogeai du regard Azur, puis Elyon. Je sentis que l’ambiance se faisait un peu froide, mais ne demandai rien, cela ne me concernait pas au fond.
Nous nous installâmes dans la voiture –c’était particulièrement étrange, c’était la première fois que j’entrai dans une telle machine-, Azur sur mes genoux.
Elle avait le regard fixé sur la créanne blonde. Je savais cependant que son esprit était toujours dans son propre corps, sinon sa prise sur mes genoux n’aurait pas été aussi forte.
La voiture démarra, et je fixai pendant un moment le paysage au travers de la fenêtre, d’un air ébahi.
Jusqu’à ce que la voix d’Azur résonne dans ma tête.
Mon petit Leaf, une fois que nous serons arrivés, j’aimerais que tu me laisses quelques instants seule avec ces jeunes gens s’il te plait. J’aurai quelques mots à leur dire.Je restai silencieux. Enfin, bien sûr, je ne pouvais pas faire taire le flot de pensées qui me traversait l’esprit… et je savais qu’Azur l’entendait.
J’étais un peu irrité et vexé qu’elle veuille me tenir à l’écart. Dans ce genre de situation j’avais l’impression que l’on me prenait pour un boulet fini.
Non, tu n’es pas un boulet. Simplement, ça ne concerne que moi et eux. Ne le prends pas personnellement, Leaf… ce ne sera pas long.D’accord, d’accord, fais comme tu le souhaites.
Je redressai la tête, et demandai, histoire d’entamer une conversation :
—
Vous vivez sur Stockholm depuis longtemps ? C’est bien, là-bas ? A dire vrai, je n’ai pas tellement l’habitude des grandes villes, fis-je avec un petit rire.