Cette fête n'était pas de ce qu'on peut appeler une réussite. Beaucoup de monde était au rendez vous c'était certain. Les dieux s'en sont donnés à coeur joie. Mais que voulez vous on n'empêche pas les dieux de faire leur show devant l'assemblée. Enlil qui se sert de l'hôte comme carton d'entrée et objet d'élégance pour apparaître avec talent. Inanna qui arrive en compagnie de son chien et qui maltraite tout le monde. Son chien qui avant de détruire la moitié de ma maison a contribué à réduire mes espoirs de normalité en cendres. Oz, mes espoirs de normalités se sont révélés du coup n'être autre qu'Ereshkigal, dieu des morts, maître des enfers. J'ai donc partagé mon lit avec un être capable de me m'ôter la vie au moindre touché. Et dieu sait qu'il y en a eu. Utu .. Toi aussi j'ai senti ton corps contre le mien. Ne crois pas que tu étais loin inaccessible et moi frivole et emplie de luxure tu n'as pas eu ton importance à mes yeux. Utu, tu es de ces êtres que je chéries et ton absence est douloureuse. J'oses espérer qu'un jour tu nous reviendras. Mais dis moi Utu. Ce jour là .. Que serais-je pour toi ? Un jouet ou une personne ? Je sais que celui qui aurait pu être, qui aurait du être mon assassin est ta moitié. Je ne ferais jamais le poids face à un tel lien. Lui aussi était là. L'assassin. Ils étaient tous là. Même le semi inconnu des papiers qui voue un culte au champagne est venu mettre son grain de sel. Un soirée riche en rebondissement comme on dit. Et encore là nous ne parlons que des dieux.

Moi, Katharyna Jehms est actuellement tracassée par bien d'autres choses. En facultatif chose auquel il n'est pas impératif de penser il y a le fait un imbécile de plus de deux mètres aux cheveux bruns, type ébène genre. Le monde regorgerait de ce genre de type ça ne m'aurait pas inquiétez plus que ça. Mais un comme celui ci il n'y en a qu'un. Et y'en a qu'un qui arrive en mode incognito pour te refiller un verre de champagne. Y'en a qu'un ! Qu'à dit Helona pour me faire rager la dernière fois ? Ah oui ! Qu'il avait une petite brunette qui lui tournait autour.. Et qu'est ce qui se passe là ? Putain nan mais la meuf .. Je .. J'.. J'hallucine ! Enfin bon ça on s'en fout, on va dire que c'est pas important. Nan en revanche ce qui est important et tout particulièrement perturbant c'est la vennue de cette créanne. Cette gamine et ce mot. Mercutio.

Je suis assise à un bar. Il est tard et il ne reste plus grand monde devant moi une lignée de verre. C'est impressionnant de voir comme je supporte l'alcool. Bon d'accord je n'en suis pas à marcher. De toute façon pour le moment je suis perchée sur mon tabouret. L'expérience de la marche n'est donc pas requise, tant mieux. Je commande encore un de ces trucs. Du whisky. Ca me rappelle des souvenirs. Il y a plusieurs mois. Bien plus de mois. Une soirée simple. Que dire d'autre ? Je me souviens juste de son sourire de gamin. Parce qu'il avait enfin un lit à sa taille. Oh joie. Ce garçon a un don pour se contredire en moins de deux. C'est triste. Trop indécis ? Un peu déboussolé ? Contradictoire ? Oui surement. Oui sans aucun doute. M'enfin ça il ne le dira jamais.


Je tourne et retourne un petit carton. Blanc de chaque coté. La seule chose c'est qu'il fait les memes dimensions que l'invitation de Mercutio. Je joue avec. Je ne sais quoi penser. Vais je l'appeler ? Lui dire quoi ? Va-t-il venir ? Je suis donc une créanne auquel le conseil peut porter de l'intérêt. Je ne sais pas comment je prendre. Cela me fait même un peu peur. Je continue de jouer et commande un autre verre. Qu'est ce que je vais bien pouvoir faire ? Mercutio n'a jamais été reconnu comme une créanne de confiance mais une créanne de puissance pour sûr. L'ignorez serait un affront stupide. Je ne suis pas rassurée mais je le ferais. Du moins je pense. C'est sans aucun doute une chance à saisir. Mais je me sens si inférieure, je n'aime pas ça. Le conseil est au dessus de tout. Je ne sais même plus ce que je veux ni ce que je cherche. Ca me réussit bien tient.. Allez buvons en cherchant la réponse !

On peut difficilement caché des choses à l’émissaire. Il faut s'appeler Lewis Steek pour cela. Globalement, Jake Hills sait se tenir informé mais très particulièrement tout ce qui concerne Katharyna Jehms. Elle ne le sait pas, mais il l’a toujours à l’oeil. Il sait quasiment toujours ou elle se trouve, ce qu’elle fait, ses projets… Sinon, comment pourrait il tenir sa promesse de la protéger ? Depuis Los Angeles, il ne l’avait pas revu, juste aperçu à la fameuse fête. Il aurait aimé la faire danser. Mais face à tout ces dieux, missionnaires et créannes, il ne pouvait pas se le permettre. Ainsi, elle était là, assise dans un bar, commandant verre sur verre.

Elle était belle. Elle était fragile. Elle était perdue. Mais son regard dégagait une force incroyable. Elle était dangereuse. C’était ce paradoxe qu’il aimait chez elle. Peut être que Katharyna s’attendait à voir l’émissaire s’installer en face d’elle. Après tout, il avait juré de la protéger et n’était ce pas le moment le plus critique de sa vie ? L’homme aux yeux verts passa une main dans ses cheveux, presque comme un tic, mais ces derniers étaient désormais attachés et juste une ou deux mèches persistaient à lui tomber devant les yeux. Jake n’était pas en colère contre elle. A vrai dire il ne saurait distinguer les émotions qu’il ressentait dans tout ce tohue bohue qu’était son être.

- Tu ne m’as appelé.

Sa voix était calme, rassurante. Un constat. Elle fréquentait beaucoup la congrégation, elle songeait même ouvrir un lupanar avec son propre frère. Mais tout cela n’était qu’un jeu. Aujourd’hui c’était quelque chose de bien plus important. Il parcouru la créanne du regard, elle portait le diamant. Les souvenirs de ces quelques jours, cette parenthèses affluèrent. Ce collier d’une valeur inestimable pour qui il avait probablement fait la chose la plus stupide de sa vie. Enfin, cette femme lui faisait faire des choses stupides. Quelqu’un dans ce bas monde avait donc réussi à décoincer l’émissaire. Et ce n’était pas la personne la plus recommandable. D’un geste il vint replacer une mèche dorée derrière l’oreille de Ka.

- Tu doutes n’est ce pas. Il t’a contacté et maintenant ta nature te pousse a aller vers eux.

Le coeur de Jake se serra. A vrai dire, il savait qu’elle n’avait pas vraiment le choix. Mais il y avait toujours différentes manières de gérer une situation.

- Je t’ai promis il y a longtemps maintenant de te protéger si tu ne nuisait pas à la congrégation.

Et maintenant ? Que faire ? Bien sur s’il elle était resté simple créanne cela aurait été simple… Ou s’il ne s’était pas attachée à elle… Mais maintenant ? Il ne fallait peut être pas qu’elle se rende compte de ce qu’elle déclenchait en elle. Si elle le trahissait… Elle pourrait se servir de lui.

- Je peux te protéger encore. Tu peux ne pas t’y rendre. S’il t’attaque, je serai là. Je les combattrais tout les trois s’il le faut.

Quoi ? C’est stupide ? Oui totalement. Autant Jake pouvait avoir une chance contre Skiller ou Eugène voir Mercutio si on est très optimiste. Mais les trois ? Aucune. Surtout en combat face à face. Il savait que si elle acceptait cette option, il y laisserait sa peau et même qu’elle aussi. Enfin, il aurait pris soin d’émettre une stratégie pour tenter de la sauver au moins. Jake ne craint pas la mort. C’est aussi l’une des raisons de ses disputes fréquentes avec Isaac, l’émissaire est un peu trop prompt au suicide. Martyr quand tu nous tiens… Bref, oui il ferait ça pour elle, et la détermination qui se dégageait de son regard ne faisait que confirmer sa volonté de tenir cette promesse. Il haïssait l’idée de lui proposer d’abord d’être son infiltrée. Sa sécurité était sa priorité.

Elle était belle. Elle était fragile. Elle était perdue. Elle était dangereuse.

Il l’aimait mais ça il ne pouvait l’admettre. Et encore moins se le permettre.

La pluie vint s'abattre contre les fenêtre du bar. La vie se riait t elle donc de Jake ? Toute son existence semblait être une vaste blague. Petit garçon ayant grandit au milieu des intrigues à la recherche d’attention mais dont le pouvoir avait été celui d’être invisible. Homme respectant chaque vie devenu assassin pour ses compétences. Second d’une congrégation, simple pion dans un rôle malléable de président du conseil des émissaires. Et aujourd’hui lié à une créanne en passe d’entrer dans le conseil restreint. Avec Katharyna, il ne pouvait plus que compter sur la force de ses bras. Dont un lui faisait même défaut. Probablement, ces paradoxes qui construisaient son être le mènerait à sa perte. Mais l’émissaire était doté d’une volonté sans faille. Et, il avait vu la même dans les yeux de Ka. Ils étaient de ceux qui ne connaissaient pas la définition du mot “limites”.

- Tu penses que je t’abandonnerais aussi facilement ? Que je suis prêt à trahir une parole donnée ? C’est donc cela, tu me penses prêt à te jeter dès lors que l’obstacle devient trop grand ?

Faire des compromis, établir des stratégies, tout mettre en oeuvre pour atteindre son objectif sans permettre un échec possible. C’était ça, sa ligne de conduite. La créanne avait joué avec lui à son jeu stupide de séduction. Les deux êtres voyaient cette relation comme un marché, des moments sympathiques et des informations. Mais le piège s’était finalement refermé et un lien plus grand était né. Il saisit le menton de la blonde entre son index et son pouce, la machoire serré, l’obligeant à plonger son regard dans le sien.

- Katharyna, je t’ai vu pleurer, je t’ai vu effrayée, je t’ai vu faible. Mais je ne t’ai jamais vu abandonner. Jake marqua une pause avant de reprendre Tu sais qu’il est toujours possible de trouver une solution. Pas forcément en affrontant de front le conseil. Tu n’as jamais pu voir l’étendue de mes capacités. Je peux t’aider. Toi qui aspirais à la liberté. Tu vas donc laisser quelques personnes te l'ôter sans réagir ? Je te pensais actrice de ta propre vie. Maîtresse de tes choix.

Tout se fracassait dans sa tête. S’était il totalement trompé sur son compte ? Tout cela n’avait il était que du vent ? Avait il été manipulé ? Idiot d’émissaire à toujours vouloir s’approcher de trop près du feu soufflé par la beauté et la curiosité du chaos qu’elle représentait.

- Ou alors c’est ce que tu souhaitais depuis le début. Semer autour de toi la mort, la discorde et le chaos. Mais si cela était ton but, tu ne te serais pas lié avec d’autres missionnaires. Tu ne serais pas là en cet instant à m’écouter.

Cette ambiguïté qu’elle entretenait dans ses relations causerait probablement sa perte. Belle créanne trop joueuse. Tu as vu la vie comme une cour de récréation et tu étais l’une des plus grande joueuse. Te voilà récompensé de tes efforts. Mais était ce vraiment cela que tu cherchais ? Sait tu au moins quelle est cette chose qui te manque tant et pour laquelle tu ne peux cesser de t’agiter dans de stupides cocktails mondain ? De l’attention peut être ?
Dans le fond, lui et elle. Ils étaient les même.

- Regarde moi Katharyna et dis moi qu’il y a plus que tout cela…

Le brun avait toujours tenu parole auprès d’elle. Jamais il ne lui avait fait défaut. Il espérait qu’elle tiendrait la sienne. Qu’elle lui parlerait sans fards. Comme elle pouvait le faire autrefois. Katharyna n’avait peut être pas vu assez de choses tragiques durant ces huit années mais Jake avait donné assez. Il ne laisserait pas l’éventualité d’un combat entre les deux se produire.

La cruauté devait avoir des limites.

Elle lui fait face. Ses doigts tremblent faiblement. L'émotion peut être. L'alcool surement. Il n'y a que le serveur qui a compté les verres pour s'assurer que l'addition soit bien payée. Il aura renoncé à son supplément plaisir qu'il espairait tant à l'arriver du grand brun. Il était pourtant persuadé d'avoir reconnu l'actrice du moment, celle qui avait rejeté des grands noms pour il parait continuer de profiter de ses coups d'un soir. Personne n'avait mentionné un quelconque géant brun dans la presse. Pourtant il se connaissaient et leur dialogue montrait qu'il y avait du vécu entre eux. Le jeune homme s'éloigna et préféra aller laver des verres que de sentir la tension et l'aura noire qui émulait du couple.

Katharyna malgré son état restait magnifique. Parfaitement calculé et professionnel. Tout était à sa place. Son rouge à lèvres, son maquillage tout autour des yeux, ses cheveux or parfaitement placé, sa robe sur mesure, son collier.. Ce collier. Elle repassa inconsciamment ses doigts dessus. Ces instants avaient bien été réels. Elle était droite malgré la tourmente qui faisait fureur dans son esprit. Elle ne semblait pas troublée et pourtant. Elle se mordait la lèvre de l'intérieur. On ne voyait donc rien. Mais cela en disait assez sur la non stabilité de son esprit en cet instant. Elle repensa au bal. Elle eut un bref vertige.  

Jake parlait. Elle l'avait toujours vu serein. Et là étrangement il semblait peu à peu dépasser la limite. A cause d'elle. Elle lui faisait ressortir tous ses défauts. Le pauvre.. Ca lui faisait de la peine de le voir comme ça. Il était faible avec elle. S'en rendait il compte. Avait il conscience qu'il perdait ses moyens et était capable des pires erreurs ? Non. Elle savait qu'il n'abandonnerait pas. Elle savait que qu'il ne trahirait jamais sa parole. Il en était incapable. Tout comme reculer face à un obstacle. Il ne savait pas faire.

Il se rapprocha et lui tint le visage. Impossible de regarder autre part. Elle n'aimait pas se faire imposer comme ça. Le regard de Jake était dur. Elle n'aimait pas ça. Elle serrait les dents ne daignants tirer un mot pour le moment. Un sourire moqueur, noir se dessina sur son visage. Aspirer à la liberté elle ? Haha ! Elle avait plutôt contribué à créer l'arène ou s'enfermer. Elle approcha sa main du visage du brun. Lui caressa la joue. Déposa un baiser sur ses lèvres. Un rire moqueur.

-Mon pauvre Jake.. tu es bien naïf.

Elle ne réfléchissait pas à ses actions. Elle n'avait pas l'esprit à les regretter, du moins pour le moment et n'avait pas l'esprit à les penser avant de les faire. Elle agissait comme ça lui venait. Jake ne pouvait pas s'approcher encore plus des créannes. Ce n'est pas parce qu'il en avait tué plusieurs qu'il faisait le poids face aux autres. Pour tuer Gerty il avait fallu plusieurs missionnaires. L'un y aviat directement laissé sa peau et un autre était mort par la suite. Jake ne fait pas la même erreur. Tout le monde n'est pas si altruiste.

- Regarde moi Katharyna et dis moi qu’il y a plus que tout cela…

Un éclair de fureur passa dans les yeux de la blonde. Son esprit hurla à l'homme de se la fermer. De cesser une bonne fois pour toute. Ses lèvres restèrent closes. Muettes. Elle se retourna. S'il y avait plus que cela.. Ahah .. Crois tu vraiment mon pauvre Jake qu'elle allait répondre à ça dans un moment pareil. Elle prit une inspiration et se retourna. Comme pour sortir du bar. Une femme s'agita dans le fond de la salle. Elle la reconnue. Cette petite brune. C'était la femme qui accompagnait Helona sur tous ses déplacements. Elle s'approcha d'elle. La jeune femme ne bougea pas.

Tout se passa en un instant. Il y eu un tigre. Un mouvement. Une tete et un corps séparé. Une femme. Elle n'aurait jamais pu réussir avec Margarita comme nom de toute façon. Katharyna se retourna vers Jake. Elle essaya de masquer son sourire triste. Elle savait ce qu'il allait penser. Il respectait bien trop les vies pour laisser passer ça. Elle gardait la tête haute et le menton levé. Technique habile pour garder les larmes.

- Tu vois Jake.. Peu importe combien nous sommes liés. Nous ne sommes définitivement pas du même monde.

Allez finissons en. Ce n'est pas un obstacle,c 'est une porte de secours que je t'offres là. Allez va !

Le gout de ses lèvres pétillait encore sur les siennes. C’était un baiser si léger, qu’on aurait presque pu croire qu’il n’avait jamais eu lieu. Elle était toujours à l’initiative de ceux ci. Jamais il ne l’avait embrassé. L’homme n’avait pas cillé lorsqu’elle se jeta sur l’indiscrète. Ni même tenté de s’interposer. C’était son choix après tout. Bien sur qu’ils n’auraient pas pu se permettre de la laisser en vie après les choses que la créanne avait entendue mais c’était la manière dont elle avait procédé qui lui laissait un goût amer. Cette rage dans son geste traduisait son désespoir. Alors que la défunte disparaissait peu à peu, le serveur s’enfuit du bar en hurlant. Sans adresser un mot à Katharyna ni se départir de son calme, Jake sortie son téléphone portable

“ Ici Jake, tu peux me trouver deux missionnaires pour aller récupérer un type ?... Il vient d’assister au meurtre d’une créanne par une autre.... N’importe qui…  Ah, si, peut être un de ceux qui ont assisté à mon dernier cours, ils sont pas très dégourdis mais savent se débrouiller… Le type est probablement du coté du centre commercial central… Je suis occupé pour l’instant…”

Il bénissait Rosalia pour ne pas lui avoir posé plus de questions. Il songeait parfois à la faire monter en grade et en faire son assistante personnelle. Normalement ce n’était pas à elle de s’occuper de cela mais bon, elle connaissait bien les élèves et il ne voulait pas déranger Nath’ pour si peu. L’émissaire fixait désormais la jeune femme. Son regard était emprunt de douceur et compassion. Sa tentative pour le provoquer avait été vaine. C’était juste un hurlement de douleur et la preuve qu’elle était bel et bien perdue.

- Tu pensais que j’allais me mettre en colère n’est ce pas ?

Combien de fois avait il assisté à ce genre de spectacle ? Celle d’un être sans respect pour la dignité d’un autre?  Katharyna savait le respect que Jake portait en la vie, elle avait tenté de le mener à rompre tout contact. Bien la preuve qu’elle ne pouvait s’y résoudre totalement. Toujours assis sur sa chaise il posa ses coude sur la table. Elle le pensait naif… En réalité, l’émissaire voulait tout d’abord lui proposer la manière qui épargnait le plus la créanne. Elle l’avait mal accueilli.  Sa voix grave perça le silence qui s’était installé

- Cette manière d’agir me rappelle que tu n’as même pas encore dix ans. Tu vois le monde de manière binaire, avec la candeur de la jeunesse. Les créannes contre les missionnaires. Mais ma belle, si c’était aussi simple, la congrégation aurait probablement annihilé le problème depuis des années. Nous sommes du même monde, tu ne le perçois pas encore simplement. Les camps n’existent pas. Regarde les dieux, les créannes, les missionnaires, entre eux ils se dévorent aussi. Mais vois tu, je ne crois pas en un monde ou chacun est la proie et le prédateur d’un autre. C’est tellement plus complexe. Ôter une vie peut parfois en sauver des milliers. Tout n’est qu’une question de mesure et de manière.

Il soupira et se leva, les pieds de la chaise crissèrent contre le sol. En quelques pas il se m’y a la hauteur de la belle. Son ton s’était alors fait plus ferme et il saisit son frêle poignet dans sa main et l’approcha d’elle.

- Ne me prend pas pour un faiblard utopiste Katharyna. A l’heure actuelle, une place de le conseil ne t’assurera pas la protection des créannes. Tu vas devenir forte mais tu es seule. Contrairement aux autres. Tu penses pouvoir te drapper dans ta solitude en me chassant de ta vie comme tu as tenté de le faire à l’instant ? Tu comptes jouer les incomprises ? La seule chose que tu y perdra c’est ta vie.

Sa prise se referma encore et il approcha son visage avec un regard brûlant de passion et de colère.

- Tu vas intégrer le conseil parce que tu n’as pas le choix. Oui cela me révulse de te savoir aux prises d’énergumènes telle que Mercution ou Eugène.  Qu’est ce que tu vas faire Katharyna ? Tu ne peux pas continuer à vivre ta vie de manière aussi frivole et inconséquente. Tu n’avais rien prévu de tout ce qui arriverait. Rien.

Elle pouvait tenter de le nier mais dans le fond l’homme avait raison. A vrai dire, l’émissaire s’en doutait qu’un jour elle se ferait trop remarqué.Il l’avait vu éclore a une vitesse ahurissante. Il avait été le premier à voir en elle tout ce potentiel. Toute l’éléctricité s’évapora alors d’un coup. Aussi subitement qu’elle était apparue. Le corps de l’émissaire se détendie et il relacha le poignet de la femme

- Maintenant, j’aimerais bien discuter avec toi comme avec une adulte censée des options qu’ils nous restent.

“Nous” C’était désormais un “nous” qui liait Jake et Katharyna ?

Le serveur s'enfuit. Jake ne broncha pas. Katharyna non plus. Elle hésita à faire revenir le tigre. Ce n'était pas la peine. Jake saisit son téléphone et appela on ne sait qui. Une femme vraisemblablement. Encore une. Brave homme. Il dit qu'il est occupé. Katharyna ne bouge toujours pas mais une aura de haine s'échappe d'elle. Il paraît qu'elle occupe bien le temps des gens. C'est gratifiant non ? Non. De plus elle aurait espéré une réaction autre de sa part. Mais rien. Il passa juste un coup de téléphone et la regarda. Il ne courra pas après l'homme. Il ne se précipita pas vers le cadavre. Il ne fit pas la moindre grimace. Au contraire. Son visage était doux. Katharyna serra les dents. Il ne pouvait donc pas réagir normalement quand il était avec elle..

Sa façon de rester statique la perturbait. Il était toujours assis. Il pensait. Il réflichissait. Il lisait en elle. Il pensait tout savoir maintenant. C'est triste. Il était bien loin du compte. S'il s'avait. Si seulement. La fin était déjà écrite. Qu'il le veuille ou non. Elle lâcha un très léger soupir. Ecouta ce qu'il avait à dire. Elle aurait aimé dire qu'il avait raison, mais elle ne pouvait pas lui mentir. Il faisait complètement fausse route. Voir le monde de façon binaire ? C'est une jolie formule mais non. Elle retint un sourire. Au final il y avait toujours deux camps mais pas toujours formé par ceux qu'on soupçonne. L'opposition. Chaque vie roule ainsi. On ne sait faire autrement. Notre vie est un interminable conflit entre deux entités.

Il se leva. Se rapprocha. Lui saisit le poignet. La maintint à ses cotés. Elle masqua une grimace. Pour autant elle ne bougea pas, elle le laissa faire, elle le laissa parler encore une fois. Qu'il fasse. Bientôt il ne pourrait plus. Elle l'écouta déblaterer de nombreuses paroles. C'était stupide. Qu'il cesse de dire de pareille chose ! C'était stupide ! Sa prise se raffermit. Son visage était proche. Un expression particulière, un regard indescriptible. Il avait beau vouloir rester neutre il ne l'était plus et ses sentiments commençaient à l'envahir. Bientôt il ne saurait plus faire la part des choses.

Il finit son flot de paroles. Il l'a relacha et elle s'empressa de ranger son bras or de sa portée cette fois sans cacher une grimace. Elle le fixa. C'était un regard intense. Un mélange de haine et de conviction. Il devait comprendre ce qu'elle allait dire. Il devait imprégner ses paroles et vivre avec celle ci. C'était ainsi rien n'y changerait. L'esprit de Katharyna était buté et là elle avait pris sa décision. Fermement.

-Un faiblard utopiste ? Mais enfin Jay c'est ce que tu es ! Peut être pas faiblard mais utopiste oui ! Mais cela te rend vulnérable. Je n'ai pas encore passé l'épreuve. Qui sait tu viendrais peut être sur le lieu du massacre. Je m'arrangerais pour laisser des traces pour éviter à tes élèves un déplacements inutile. Je ne serais pas seule. Peut être que je n'aurais que des gens à manipuler mais au moins je saurais quoi faire face à eux. Je n'y perdrais pas la vie. Sauf si tu insistes. Là, tu y perdras la vie en premier et je suivrais surement. Contre mon gré.

Son visage s'était fait plus dur. Elle avait mis de la distance entre eux. C'était désormais presqu'un rictus de colère qui se dessinait sur son visage.

-Je vais peut être faire parti des créannes anciennes oui. J'ai été choisie, oui aussi. Mercutio est venu me voir c'est ainsi j'accepterais. C'est un choix. Je coucherais même avec lui. Je n'ai aucun doute sur le fait qu'il soit bel homme. Je suis créanne et en plus c'est mon job.. Allons bon ! Ca coulerait presque de source ! Je n'avais peut être pas prévu que cela arrive si vite mais peu importe ! Je m'y ferais je tracerais mon propre chemin.

Elle tiqua sur ses derniers mots.. Pauvre homme. Elle posa une main sur le comptoir et planta son regard dans le sien plus sérieuse que jamais avec un sourire noir sur le visage.

-Mais Jay .. Il n'y a pas de nous qui tiennes désormais. Allez retourne voir ton dieu et fiche moi la paix. Ca s'arrête là. On s'est bien amusé. C'est tout.

Un billet sur le comptoir. Elle lui tourna le dos et se dirigea vers la sortie.