On nous fit entrer dans la demeure, où l’on nous indiqua de patienter dans un vaste salon. Je ne pus m’empêcher d’observer les moindres détails, peu habitué à pénétrer dans ce genre de bâtiments. Des meubles finement sculptés, des murs agréablement décorés, chaque parcelle de cette maison semblait valoir une véritable fortune.
Alors, la maîtresse de la maison entra dans la pièce, nous adressant un sourire. Je me penchai un peu en avant, saisit délicatement son poignet afin que mes lèvres viennent effleurer le dos de sa main. Il me semblait que c’était un geste de respect, plutôt peu employé.
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Enchanté, mademoiselle… ou devrais-je dire madame ? Je me prénomme Leaf.Je me redressai ensuite, et l’observai un peu tandis qu’elle s’asseyait. Grande, blonde, élégante, des yeux d’un bleu éclatant. C’était une belle femme, je ne pouvais pas le nier.
Cependant, quelque chose me perturbait. Ce qu’elle dégageait, ce qui émanait d’elle. C’était tellement… puissant. Différent de ce que dégageaient les créannes que j’avais pu croiser. D’ailleurs, son compagnon possédait cette même aura terrifiante.
Anciennes.Oui, ce devait être cela. Des Anciennes. Notre forme la plus puissante, que j’étais très loin de posséder. Il ne me semblait même pas qu’Azur possède un tel pouvoir. En fait, je ne savais pas si on pouvait dire que cela se « possédait ». Le statut d’Ancienne s’acquérait, mais je ne savais pas trop comment.
— Bien le bonjour. Que me vaut cette visite ?
J’adressai un sourire aimable à la jeune femme. Pourtant je me mis à paniquer intérieurement. Que devais-je lui dire ? Je ne savais pas pourquoi Azur avait tenu à ce que l’on vienne ici… et elle ne prenait jamais sa forme humaine… alors…
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Eh bien… disons que…* * Azur * *
Des Anciennes. Allons donc. J’étais plutôt rarement surprise, mais là je devais bien avouer que j’étais prise au dépourvu. Je ne m’attendais pas à ce qu’elle soit devenue aussi puissante. Je ne m’attendais pas à ce qu’elle soit accompagnée d’une seconde Ancienne non plus. Hm… il allait falloir être prudente. Même si techniquement Miss Jehms n’avait qu’une dizaine d’années tandis que moi j’en avais deux-cents, elle était plus puissante que moi, désormais. Chacun de mes mots allait compter.
Je perçois la panique de mon petit Leaf. Ah, oui, il ne sait trop que faire en cet instant. Evidemment, il ne devait pas comprendre l’importance de la situation. Il devait aussi sentir la puissance de ces deux créannes, sans en comprendre vraiment la nature. Des Anciennes, mon petit Leaf, des Anciennes.
Bon, allons-y alors, avant que mon adorable petit blond ne dise une bêtise en voulant bien faire. Je saute de son épaule, et avant de toucher le sol je reprends forme humaine. Je ne l’avais pas reprise depuis le moment où j’avais trouvé Leaf.
J’esquisse une révérence face au couple, avant de leur adresser un sourire poli.
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Ainsi donc les rumeurs disaient vrai. Miss Katharyna est de retour à Stockholm. Vous me voyez honorée de vous rencontrer ; je m’appelle Azur.Je fais une autre révérence face à l’homme à ses côtés.
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Bonjour. Je ne m’attendais guère à ce que Miss Jehms soit accompagnée, surtout par quelqu’un d’aussi puissant que vous. Je suis ravie de faire votre connaissance !Nouveau sourire.
* * * *
Azur quitta mon épaule, et… et reprit forme humaine ?! Je ne m’attendais pas à… à cela…
A dire vrai, je ne l’avais vue qu’une seule fois. Juste après ma naissance. Et en vérité, je n’en avais que de vagues images floues, j’avais l’impression de la redécouvrir. Cela faisait des mois que je voyageais avec elle, je découvrais enfin sa forme humaine. Elle était dos à moi, alors je me contentai d’observer ses cheveux courts, d’une couleur blanche, argentée. Elle portait une simple robe bleue, simple mais toutefois élégante. A moins que ça ne soit dû à sa prestance naturelle.
Décidemment, Azur me fascinait. Sa voix douce et légère s’éleva à nouveau :
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Je souhaite simplement discuter avec vous. Nous sommes dans le même camp, n’est-ce pas ? Si vous acceptez de vous entretenir avec moi… avec nous…Elle se tourna un peu vers moi, et je me perdis dans le bleu profond de ses yeux.
—
…nous en serions très honorés.