Je m'ennuie, pensai-je, allongé dans la poussière sans consistance de mon royaume. Au-dessus de moi, le ciel d'un noir d'encre n'offrait aucune prise à mon regard mais je me plaisais à imaginer toutes sortes de formes auxquelles je donnais naissance en un tourbillon de fine poudre grise. Les rêves sont beaux, étranges et brillent d'une lumière particulière.
J'aurais aimé à ce moment prendre conscience de l'heure et me dire que je n'avais strictement rien fait de ma journée, malheureusement, ici ni journée ni temps. Ce qui ne changeait rien au fait que je ne faisais rien.

Je n'avais d'ailleurs aucune mauvaise conscience à avoir puisque théoriquement je pouvais rester ici autant que je le désirais, entre les taches quotidiennes qui me prenaient toute ma journée... sur Terre. Oui je sais, c'est pratique de sortir du temps pour se reposer, manger quelque chose ou que sais-je encore... Enfin ce n'est pas non plus comme si j'avais besoin de manger, mais sentir de la nourriture entrer en soi réveille des sens inexploités qui provoquent presque immanquablement une réelle empathie pour les hommes.
Un peu distrait par cette idée je me mis à créer sans vraiment y prendre garde des gâteaux, boissons, crêpes, plats divers, salades à volonté, sucreries en poussière. Le tas devint vite conséquent et je fronçai les sourcils. C'est contrariant de créer autant de mets délicats mais immangeables. Oui, immangeables, la poussière c'est un peu sec.
Agacé, je me levai et me mis à faire les cent pas au fond d'un cratère. Un jet de poussière prit une forme humanoïde et fit germer une délicieuse idée dans mon esprit.
Un banquet! Un banquet comme nous en faisions jadis à la fin des réunions du panthéon!
J'eus un sourire en y repensant. Nous n'étions pas seuls à cette époque. Et un peu de compagnie me sortirait certainement de cet ennui sans fin.
Mais qui inviter? Je n'avais pas vraiment envie de voir Ershkigal et ses lubies de gamin, et Nin Hursag m'en voulait depuis que je lui avais valu un passage de remontrances d'Utu. Je me forçai à ignorer le nom de mon frère pour me concentrer sur une autre personne. Enki... excellente idée. Le Dieu de l'eau était quelqu'un d'agréable bien que remarquablement ambivalent entre son travail et le reste... Il ne tenait pas du tout l'alcool... Il serait parfait, une fois que j'aurais réussi à le sortir de ses dossiers. Je ricanai intérieurement en pensant au temps depuis lequel il n'avait pas pris de vacances, et surtout à l'idée qu'il me verrait comme un tentateur maléfique essayant de l'éloigner de sa divine tache.

Je me dirigeai vers un endroit plat afin de dresser une table et quelques divans, d'installer un peu de lumière électrique et de créer une ambiance festive, avant de créer les mêmes plats qui m'avaient agacé tout à l'heure, mais mangeables cette fois. Satisfait, je me posai alors la question de savoir comment extraire ce cher Enki de sa forteresse de papier.

Impossible d'arriver à sa porte avec un grand sourire en lui demandant de laisser tomber son boulot pour venir se bourrer la gueule. Peut-être qu'en envoyant quelqu'un... Mais non, mes quelques émissaires étaient en mission, sauf une, qui dormait au retour de sa mission, mais j'eus pitié d'elle.
Bon; il allait falloir trouver autre chose. Quelque chose qu'il verrait et qui lui ferait penser à moi... Hum.
Quelque chose que nous gérions en commun.

...

Les marées. Excellent. Héhéhé, j'allais lui concocter une petite marée d'équinoxe, avec presque deux semaines d'avance...
Et voilà, la Terre, la Lune et le Soleil en alignement parfait. L'eau va monter, cher Enki...

Tu as faim?

Très loin au Sud, la longue nuit polaire venait de commencer. Pendant six mois ces terres m'appartiendrait totalement au détriment de mon frère, qui lui gardait celles du Nord.
Il fallait bien fêter ça, ce serait une excellente excuse pour avoir embêté Enki.
A propos de lui, il venait selon toute apparence de quitter son royaume lointain.
Je m'affalai négligemment sur un sofa tout en souriant; le Dieu de l'eau n'allait pas tarder.

Que pourrais-je inventer pour qu'il reste un peu et accepte de boire? Tout en réfléchissant de dessinai à distance dans la poussière.
Je fus interrompu soudainement par la sensation qu'une flaque d'eau stagnait près de l'entrée de ma demeure, flaque à laquelle j'ouvris d'un geste pour constater qu'elle avait l'apparence d'un homme mince et discret, aux cheveux sombres et portant de petites lunettes.
Je me demande bien pourquoi il porte des lunettes, d'ailleurs. En tant que dieu il ne devrait pas en avoir besoin.

" Bonsoir Nanna, je vois que tu as déjà tout prévu. Je risque pourtant de vite m'éclipser, c'est malheureux. "

Ce cher Enki lorgnait du coin de l’œil sur la table -qui, il fallait bien l'avouer, était vraiment très garnie- et me tira un léger rire tandis que je me levais pour lui faire face.
Je penchai la tête de côté, amusé, et l'invitai d'un geste à s'installer.

_Voyons Enki, ne pense pas déjà à repartir! Pour une fois que quelqu'un a réussi à te tirer de la mer de paperasse qui te sert de royaume, tu ferais bien d'en profiter...

Je m'approchai du banquet et examinai penché en avant, les mains dans le dos les différents mets raffinés qui se trouvaient là. Je finis par jeter mon dévolu sur une sucrerie à la fleur d'oranger que je dégustai en savourant le goût sucré qui me rappelait tant la terre et les humains. Puis, dans un bonheur légèrement mélancolique et teinté de souvenirs, je me retournai vers mon invité si rigide.

_Sers-toi, je t'en prie, prends ce qui te fait plaisir. Après tout aujourd'hui est un jour spécial, c'est le jour où je retourne enfin du côté de chez toi ! Ça ne te donne pas envie de faire la fête de savoir que tu vas devoir supporter mon regard pendant six mois?

J'éclatai d'un rire longtemps contenu. La solitude m'aigrissait, me rendait amer. Et quand enfin quelqu'un me sortait de mon ermitage je n'en étais que plus extraverti, quoique ce soit probablement un peu forcé.  Malgré tout la présence de cet invité à la personnalité si complexe me rendait heureux.
Au moins autant qu'elle me donnait envie de comprendre.

D'un air coupable de gamin qui vole de la confiture, je me servis un verre d'un nectar alcoolisé qui se faisait beaucoup au temps de notre jeunesse. Cela m'amusait d'afficher des expressions sur mon visage d'ordinaire si neutre.
Bien décidé à rendre mon compagnon ivre je servis un deuxième verre que je lui mis entre les mains en souriant.

_Buvons au début de la nuit, cher Enki. Elle est propice aux fêtes et au rire. Et ici elle est éternelle, dis-je en levant mon verre.

Je souris lorsque mon invité accepta mon offrande pour s'installer sur l'un des sièges. Ce sourire je le savourai d'autant plus que mon compagnon le voyait. Après mes longues nuits solitaires il me venait tout naturellement, réminiscence peut-être d'une frustration ayant trop duré. Jadis à l'aube et au crépuscule le soleil me rendait visite, mais c'était terminé. Je m'efforçai d'éloigner ces sinistres pensées en noyant mon sourire dans mon verre presque plein de ce nectar si savoureux. Son goût était une véritable symphonie divine; la douceur sucrée était relevée délicatement d'une note d'amertume et le tout était simplement parfait. Cela me faisait penser au caractère si harmonieux de mon étonnant invité. Qu'on le voie à un moment où un autre, il était chaque fois différent, passant sans transition d'un sérieux à toute épreuve à une légèreté insouciante et presque inconsciente. Étrangement cette complexité lui allait comme un gant et ne déparait en rien l'atmosphère de droiture qu'il dégageait. Véritablement, l'hôte le plus intéressant dont on puisse rêver.

“ Depuis combien de temps n’a-t-on plus fêté comme ça ? Ça me semble affreusement loin. ”

Je résistai à l'emprise de sa phrase tentant de me ramener des siècles en arrière. Mieux valait ne pas trop penser à ces moments de bonheur lumineux, au risque de devenir encore plus nostalgique. Étrange de ma part d'ailleurs, de m'en rappeler encore si bien, d'en raviver sans cesse les souvenirs plutôt que d'avoir simplement choisi d'oublier. Certes l'oubli était très lent à œuvrer mais en 6 millénaires j'en aurais eu tout le temps. Je haussai intérieurement les épaules tandis qu'Enki soupirait, les yeux au ciel. Quelle ambiance, vraiment. Peut-être lui aussi pensait-il à son frère, complément indispensable à son existence. Ou peut-être pas.
Je contemplai, amusé, les jeux de ce dieu facétieux avec le liquide qu'il maîtrisait à la perfection. Cela me fascinait toujours autant.

_A présent, cela  fait bien longtemps. Quelle lumière alors ! j'eus un rire certes un peu amer. Mais tu vois nous sommes encore capables de cette paix...

Ce disant, j'élevai d'un clignement d’œil un fin filet de poussière qui vint s'enrouler autour du poignet fin de mon cher Enki.

Je lève mon verre au nectar et à la nuit, Enki ! Allons, bois donc, je sais que  tu en crèves d'envie !

Le bracelet de poussière tenta d'entraîner le bras qu'il enserrait vers le haut. Oh, bien sûr, jamais une si petite chose ne contraindrait un Dieu à boire, mais puisqu'il en avait envie, cela lui ferait une excuse. Je lui lançai un clin d'oeil assorti d'un sourire en coin avant de me rapprocher de lui. Me laissant aller en arrière, je croisai les jambes avec nonchalance en sirotant mon verre. Délicieux. J'avais envie de m'amuser.

_As-tu rencontré notre "cher" Nin Hursag récemment ? Personnellement je l'ai croisé en Europe pas plus tard qu'il y a quelques semaines. Il est impressionnant. Toujours aussi beau.

Je lui adressai une mimique amusée en le regardant par en-dessous. Quel plaisir de le taquiner; j'espérai qu'il s'y prêterai de bonne grâce comme il l'accordait parfois, en attendant que notre état à tous les deux nous permette vraiment de s'envoyer des piques...
Je nous resservis tous deux et profitant de ma station debout j'en profitai pour ébouriffer ses cheveux en riant. Vraiment sa compagnie avait sur moi un effet relaxant, bien plus que l'humour aigre d'Ershkigal ou les préceptes antiques de Nin Hursag. Je levai mon verre jusqu'à ma bouche pour m'y tremper les lèvres, encore sucrées de la pâtisserie que je venais de manger. Une belle nuit.

“ J’aimerais bien que vous soyez capable de faire la paix toute l’année. Vous aurez une vraie raison pour me sortir de mon boulot quotidien. ”

Je levai les yeux, un peu affolé sur le coup, sorti de ma suave torpeur. Faire la paix toute l'année hein ? Oui, ça t'épargnerait du travail, toi qui tiens tant à l'harmonie ambiante, à la paix, le bon temps, le travail bien fait. Mais faire la paix, faire la paix avec lui ?! Inconcevable, le lion ne s'associe pas avec le cafard, cafard, fard... Cet être abject en bon termes avec moi. Mon frère honni, ou non, cet homme honni, puisque avouons-le, il est l'esclave d'émotions plus qu'humaines, en paix avec moi ? Riant de mon calme, jouant avec mes cheveux, éclairant de son sourire le crépuscule et l'aube incertains, méditant de concert avec moi, se moquant de mes peines. Jamais plus cela ne se produira. Il lui a suffi d'un "oui" pour détruire nos vies, un oui unique, sincère, exprimé du fond du cœur. Qui entraîna la chute. Tout est de ta faute, Utu.
Et lui, Enki, ce petit garçon trop vite grandi, cet absurde adulte responsable, comment pouvait-il lancer ce sujet maintenant, dans mon propre royaume ? Je serrai mon verre de toutes mes forces; il n'éclata pas, les produits divins sont de qualité. Lorsqu'on est Dieu tout est tellement compliqué. Que faire lorsqu'on sait que chaque action a encore une infinité de temps pour se répercuter et nous revenir en plein visage. La futilité, la futilité nous reste seule.

“ A la nuit Nanna, en espérant qu’elle soit calme. ”

...Qu'elle soit calme. Elle ne l'est jamais quand tu es là, Enki. Tu parlais donc de nos altercations avec Nin Hursag, ce cher Ershkigal et cette mégère d'Innana. Rien d'important en somme, seulement de petites querelles meublant l'ennui immortel qui est le nôtre. Que je suis susceptible, après tout; et comment empêcher un être comme lui de parler sans surveiller ses mots.
J'eus pour lui un petit sourire, sans superbe, un peu contrit et triste. Une obsession, certes. Cela tourne à l'obsession. J'attrapai du bout des doigts un dessert sucré et l'avalai sans procès, avant de lever mon verre.

_A la nuit, et à l'océan, que ses abîmes d'oubli ne nous fassent jamais défaut ! D'ailleurs tu sais bien que ces petites querelles nous préservent de véritables guerres, et il faut bien ça pour distraire les grands enfants que nous sommes ! Rien que de petites rivalités dont on se persuade qu'elles sont fondées pour que nos pensées connaissent un but, ajoutai-je en riant

_Allons, ne garde pas cet air guindé, tu ressembles à un petit lord ! Tu as bien compris que j'essayais de te faire boire de toute façons, n'est-ce pas ? Et regarde, je bois moi aussi, c'est équitable non ? Oh et d'ailleurs, je suis certain que tu es incapable de vider ton verre aussi vite que moi

La nuit nous enveloppait de son lourd manteau, les chaudes lumières des lanternes éclairaient une table couverte à profusion, et un ami à embêter parfaisait ce doux tableau. Oh Enki, que je t'aime pour ça...

Le Dieu de l'Eau... Un personnage adorable, vraiment. Toujours discret mais si distingué, à part bien entendu lorsqu'il s'agit de boire, auquel cas il sait faire preuve d'une avidité sans pareille qui rappelle un enfant quémandant des bonbons. En beaucoup plus classe, bien sûr. Je détaille avec amusement son costume trois pièces d'un gris bleuté qui sied parfaitement à son teint, ses légères lunettes et son beau regard bleu. Un véritable Dieu, n'est-ce pas ? Pas comme... J'éloigne mon frère de mes pensées tout en buvant à longs traits le nectar divin qui coule telle une source fraîche dans ma bouche.
Enki vient encore de vider un verre de l'alcool ambré, un immense sourire aux lèvres qui me réchauffe le cœur. Mine de rien, il a la descente rapide... D'un geste je remplis à nouveau nos flûtes et obtempère à ses judicieux conseils. L'infini du Néant me sert de toit et j'y perds mes yeux tout en levant la coupe à mes lèvres. Je baisse le regard sur Enki qui se lève, feignant un parfait équilibre et achevant son mouvement appuyé sur la table, croquant distraitement dans des petits fours tout droit venus de la cuisine d'un chef russe.

“ C’est un sacré choix que nous avons là, que me recommandes-tu ? ”

J'eus un rire, très détendu moi aussi, en le voyant lascivement caresser le bord de la table. Je me rapproche de lui et viens me placer à ses côtés, détaillant les mets présents sur la table. Qu'est-ce qui pourrait lui plaire ? Mon regard passe sans être retenu sur divers plats salés, sur une corbeille de fruits exotiques. Non, il faudrait quelque chose de plus... doux ? De sucré peut-être... Oh, je vois, des loukoums ! Cela devrait lui plaire. Je veux juste lui donner quelque chose qui lui plaise...
J'en attrape un du bout des doigts, de couleur bleue ce sera parfait pour lui. Cet adorable enfant... Je lui souris en me tournant vers lui, faisant tinter mes bijoux scintillants, et penche un peu la tête sur le côté, amusé.

_Ceci devrait te plaire, cher Enki...

Je lui mets délicatement le loukoum dans la bouche, notant au passage les diffuses taches roses agrémentant son teint parfait.

_Allons, mange ! Ces sucreries sont délicieuses, tu sais ? Haha, je devrais te sortir plus souvent de ton palais de paperasse, tu es si mignon quand tu bois !

Je vide mon verre en sentant avec ravissement mes sens se réveiller et une étrange chaleur se nicher dans ma poitrine. Ce qui est le plus amusant c'est de constater que ça lui fait beaucoup plus d'effet qu'à moi ; il semble un peu confus et ses couleurs m'évoquent de la gêne. A vrai dire je meurs d'envie de le taquiner pour voir cet adorable visage qu'il montre lorsqu'il est vraiment gêné. Nin Hursag ne m'en voudra pas maintenant qu'il court après Inanna...

_Ton beau visage m'intrigue, Enki... A quoi penses-tu ?

Je m'empare d'un deuxième loukoum et le dépose sur ses lèvres de la même manière, avant d'en prendre un moi aussi. L'oubli... peut-être daignera-t-il venir, cette fois-ci.

_Des loukoums, Enki, dis-je avec un air désabusé tout en déplaçant le siège du Dieu des Eaux à son point de chute pour qu'il ne se casse pas la gueule, d'un geste du bout des doigts. Je baisse les yeux sur lui, un peu rose et un sourire idiot plaqué sur son visage, visiblement quelque peu éméché. Je l'envie, en fait...

_A vrai dire j'aimerais parfois que moins de choses me passent par la tête... Mais peu importe, amusons-nous !

Un vieux poste radio apparaît sur une petite table, assorti d'une collection de chansons humaines de ce siècle. J'ai appris, récemment, à utiliser cet appareil avec ces disques de plastique en compagnie d'une missionnaire d'Enlil. Le premier CD commence à tourner sous le lecteur au son d'une chanson plutôt dynamique, en anglais, du nom de "Barbie Girl". Je tire Enki debout par le poignet et commence à chanter en le faisant danser.
I'M A BARBIE GIIIIIIIIIRL, IN A BARBIIIE WOOOOOOOORLD, LIFE IS PLAAAASTIC, IT'S FANTAAAAAASTIC !
Vas-yyyy petit Enki ! On DANNNNNNSE ! Wesh ! J'ai toujours rêvé de le faire un peu sortir de ses gonds, histoire de le voir perdre le contrôle, juste un peu. D'un geste je remplis à nouveau son verre et le lui propose entre deux déhanchements.

_Vas-y Enki, bouge ! Laisse-toi donc un peu aller, je rêve de voir ça, hahaha !

Comme un morceau de rock passe je lui attrape les mains et l'entraîne dans un enchaînement de passes endiablées. J'ai appris il y a quelques décennies, à Brooklyn, et même si mes pas restent approximatifs je crois que je m'en sors. Enki en tout cas fait une très mauvaise cavalière, beaucoup trop rigide et guindé, résistant à toutes les pressions que je peux lui communiquer pour guider ses pas. Je crois bien qu'il ne fait pas exprès... Il faut encore qu'il boive, je crois. Je m'arrête, le fait tournoyer jusqu'à son fauteuil dans lequel je le lâche, avant de lui fourrer dans les mains un grand verre et de lui enjoindre :

_Allez cher Enki, cul-sec !

Je pars dans un grand rire, ironique et attendri en l'imitant, dégustant avec délices le nectar divin.