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Il faut parfois remettre certaines choses en question.
Leaf
Messages : 84
Localisation : Quelque part dans les bois.
Loisirs : Voyager.
Humeur : Plutôt... neutre.
Leaf
Leaf

Personnage...
Pouvoir: Entrer dans ta tête mon cher !
Dieu: Nin Hursag
Age: Bien plus jeune que toi...
Sam 10 Sep - 19:29
HRP : Attention : pavé. xD

Il faut parfois remettre certaines choses en question. 4DKB1MYwsCSAzU5YAeANFFrPgzI
Je regarde d’un œil distrait Leaf, sous sa forme de renard, en train d’observer d’un œil de chasseur un petit écureuil qui tourne autour d’un tronc d’arbre, quelques mètres plus loin. Leaf est l’une des créannes les plus étranges dont j’ai pu m’occuper. Enfin étrange, ce n’est pas le mot, mais c’est plutôt différent disons. Cela fait un an maintenant qu’il vit avec moi. Pourtant il ne cherche toujours pas à s’émanciper, à établir ses propres projets. Il compte toujours sur moi, toujours. Tout ce qu’il fait, c’est pour moi qu’il le fait. Jamais je n’avais vu une créanne qui m’était aussi dévouée. Mais il n’a toujours pas vu l’intérêt pour lui-même. Oh, il a bien compris que les missionnaires n’étaient pas mes amis, par conséquent il ne les aime pas non plus ; mais ce n’est pas son opinion à lui. C’est compréhensible en même temps cela dit, après tout il ne s’était que peu retrouvé face à des missionnaires. Il ne s’était jamais fait attaquer, il n’avait jamais vu de camarades mourir sous ses yeux. Je ne crois pas qu’il saisisse l’enjeu. Ça ne concerne pas que moi, mais toutes les créannes du monde. Ce n’est pas moi en particulier qui ne les aime pas, c’est tout un peuple qui est leur ennemi. Mais je n’arrive pas à le faire comprendre à Leaf.

Cela dit, j’avoue mettre moins d’ardeur avec Leaf qu’avec tous ses prédécesseurs, depuis quelques mois en tout cas. Le monde change, moi je ne change pas. De fait, j’ai l’impression que ça bloque quelque part. Je ne sais pas si cela pose problème, j’ai juste l’impression que c’est différent d’avant. Les dieux sont plus en retrait. Ou plutôt, j’ai l’impression que les missionnaires s’en détachent plus. Parce que certes, mon but est de mener Leaf vers mon maître, vers Skiter. Mais, tant que je suis proche de la Congrégation, j’en profite aussi pour garder un œil dessus. Parfois, il m’arrive de suivre des missionnaires lorsqu’ils sortent en ville, lorsqu’ils ne font pas attention aux auras qui les entourent. Je les entends parler entre eux. Certains d’entre eux pensent indépendamment de leur dieu, de ce que j’ai pu en comprendre.

Les mœurs évoluent avec le temps. Auparavant, les humains accordaient beaucoup d’importance au fait de servir les dieux. L’existence du Panthéon sumérien ne leur paraissait pas si étrange, et ils s’y pliaient, il restait encore en eux des traces, des restes de la loyauté que les peuples antiques accordaient aux dieux qui faisaient leur quotidien, et arrangeaient toute leur vie. Mais les dieux n’avaient pas prévu qu’avec le temps les humains s’éloigneraient d’eux. Alors qu’ils ont désespérément besoin de serviteurs pour répandre leur nom, ces derniers sont bien plus sceptiques qu’auparavant. Ils semblent bien moins radicaux dans leurs opinons, et de fait je me sens bien moins inquiète de traîner aux alentours de Stockholm maintenant qu’il y a cent cinquante ans.

Et tout ceci me pose problème dans mon travail. Parce que comment faire comprendre à Leaf la dangerosité des missionnaires si ceux-ci ne le sont plus ? Je ne sais pas vraiment quoi faire. Que pourrais-je dire à Skiter à ce sujet ? Les temps et les opinions changent. Je ne sais pas si c’est une bonne chose, ou pas. Même du côté des créannes, ça change. Je croise bien plus souvent de vieilles créannes à avis neutre qu’auparavant, ce qui signifie bien qu’elles n’ont jamais croisé, été confrontées à des missionnaires auparavant. N’est-ce pas… ?

J’ai une pensée, un peu confuse, pour Nao, la créanne chouette que j’avais croisée à Noël dernier. Ses mots m’avaient marquée bien plus que je ne le pensais à ce moment-là. Pourtant, je ne comprends toujours pas. Comment pouvait-on espérer une quelconque paix ? Je n’y crois pas, je déteste toujours les missionnaires. Pourtant, alors qu’auparavant aucune parole ne me touchait, les siennes m’avaient semblé avoir du sens. Je ne sais pas, je ne sais plus. Je tâchais de faire taire tout cela, mais je m’étais mise à y repenser il y a un ou deux mois, et plus cela allait, plus j’étais confuse, sans que pour autant je ne sache dire pourquoi. Qu’est-ce qui était différent d’avant ? Pourquoi ne pouvais-je juste pas continuer à faire ce que je faisais sans me poser de questions ? C’est si compliqué…

Je détourne mon regard du petit renard au pelage de feu. Voyons les choses venir, après tout j’ai toutes les années que je veux devant moi, n’est-ce pas ? Enfin, toutes les années que le monde dans lequel je vis veut que j’aie devant moi, plutôt. Car il suffirait d’un pas de travers pour m’attirer les foudres soit de la Congrégation soit de Skiter.

Nous avions entrepris un autre voyage en France. Non pas que j’aie quoique ce soit à faire là-bas, simplement en ces temps troublés j’avais besoin de rentrer « chez moi ». J’aimais retourner dans les campagnes, dans le centre de la France, c’était par là-bas que j’étais née. Je m’y sentais rassurée, comme en ces temps-là, où l’espoir guidait mon cœur bien plus que la haine ou le désir de venger les miens. Une époque qui n’aura pas duré longtemps… Le temps que je comprenne qu’Utu ne reviendrait jamais et n’apporterait jamais les réponses à mes questions, que je comprenne que j’avais juste été traitée comme un déchet, en fait.

Malgré tout, en effet, j’aime beaucoup revenir ici. C’est comme une coupure, loin de la Congrégation, loin de Skiter aussi –enfin, « loin » est un bien grand mot-. Je veux juste y être en paix. Sans créannes devant lesquelles jouer un rôle, ni missionnaires à éviter.

Je reprends forme humaine afin de sentir un peu la terre et l’herbe sous mes pieds. Je me balade toujours pieds nus, c’est toujours plus agréable de sentir la nature autour de soi en plus de la voir. C’est quelque chose que les humains semblent aussi avoir oublié, malheureusement… Quand je vois les enfants de nos jours, accolés à ces « écrans » plutôt que de sauter dans des flaques de boue, cela me rend un peu triste, j’avoue. J’ai l’impression qu’ils en oublient ces joies, dont les enfants de l’histoire ont pu jouir. C’est si différent. Pas tellement par ici, cela dit ; lorsque l’on s’éloigne des villes denses, les gens s’attachent à la nature environnante. C’est bien pour ça que je préfère toujours les petits villages aux grandes capitales…

Je redresse justement la tête en entendant des cris enjoués, un peu plus loin. Un ballon roule jusqu’à mes pieds, et un petit garçon blond demande alors, un peu mal à l’aise :

— Dis madame, tu peux nous renvoyer le ballon, s’il te plaît ?

J’adresse un sourire doux aux deux enfants, le blondinet et une petite brune, avant de récupérer le jouet afin de leur lancer. Ils me répondent tous les deux, en cœur, un grand « merci ! » avant de repartir plus loin continuer leurs jeux.

On m’avait toujours dit que j’avais un fort instinct maternel. Je ne saurais dire si c’est dû à ma nature, ou si c’est venu avec mon travail. Au fond, je m’occupe toujours de « bébés » créannes. Quand bien même une créanne nouvelle-née ait l’air d’avoir cinquante ans, elle ne connait pas plus de choses en arrivant au monde qu’un bébé humain, elle sait seulement ce que son instinct lui dicte. Après, tout le reste, elle l’apprend, comme toute chose.

Le fil de mes pensées est alors coupé net lorsque j’entends un cri strident venir de derrière moi. Je me retourne brusquement, prête à intervenir. Là-bas, un peu plus loin, il y a toujours les deux enfants avec leur ballon. Seulement, le petit garçon blond est à terre, et la petite fille lève des yeux terrorisés vers une énorme bête poilue, plusieurs fois plus grosse qu’elle. J’écarquille les yeux. Les grizzlis ne se trouvent pas aussi près des habitations, normalement… ! Alors que je reprends ma forme de faucon pour m’approcher plus vite des deux enfants, je me rends compte que quelque chose cloche. Une telle aura… c’est une créanne, j’en suis certaine. A peu près de mon niveau, je crois. Une Instable, et en plus de ça, je repère une deuxième aura, Instable aussi, juste à côté.

Je me pose en vitesse entre la première et les deux enfants, les bras écartés dans un geste protecteur.

A quoi est-ce que vous jouez ?!

Ces enfants sont des créatures innocentes. Quel intérêt de s’en prendre à ces petits ? Notre but n’est pas de s’en prendre aux humains innocents.

Gardez vos dons et votre énergie pour des choses plus utiles, craché-je.

Il faut parfois remettre certaines choses en question. ZwqMlpNEPeUF2CPaAzGcwrtjZPw
J’étais couché sur un tapis de feuilles, la gueule entrouverte pour mieux sentir les effluves de la forêt. J’aimais bien quand Azur m’entraînait dans ses voyages, ça changeait de la ville froide qu’était Stockholm. Je commençais à bien connaître les bois qui bordaient la ville suédoise, alors j’étais plutôt content lorsque nous pouvions changer de lieu de balade.

Un bruit vint me chatouiller les oreilles, qui se tournèrent automatiquement vers l’origine de la nuisance. Ce n’était ni un chant d’oiseau, ni les grattements d’un quelconque rongeur. Je fermai les paupières, me concentrai, afin de mieux saisir ce qui m’entourait. Mes poils se hérissèrent et mon cœur loupa un battement lorsque je perçus l’aura d’Azur, tandis que mon odorat me permit de détecter la forte odeur métallique du sang. D’ordinaire elle ne me dérangeait pas. Mais là, j’avais un très mauvais pressentiment. Je bondis sur mes pattes avant de détaler vers l’origine de tout ceci.

Un glapissement terrifié s’échappa de ma gorge, entre deux inspirations saccadées. Plus loin, sur un petit chemin, il y avait Azur étendue par terre. Derrière elle,  un enfant, un petit garçon. D’après l’odeur, il saignait beaucoup, et il n’avait pas l’air de remuer beaucoup non plus. Encore un peu plus loin, une petite fille qui pleurait, en silence, manifestement trop choquée pour sangloter ou même hurler.

Je m’approchai prudemment. Il n’y avait rien aux alentours. Qu’est-ce qui s’était passé, enfin ?! Je n’avais jamais vu Azur perdre une seule confrontation ! En tant que créanne, elle ne peut pas perdre un combat contre un animal ! C’est… c’est juste anormal !

L’angoisse me serrant l’estomac, je reniflai un instant une plaie qu’avait Azur au visage. Sur sa joue, des marques, qui ressemblaient à des griffures, et sur sa tempe, où un hématome commençait à se dessiner. Je passai un coup de langue fébrile sur le sang qui coulait de la blessure dans l’espoir de la faire revenir. Allez, reviens ! Si toi tu n’as pas réussi, comment je vais faire, moi ?! Pour vous protéger tous les trois ! Quel animal laisse ses proies en plan comme ça, honnêtement ?! Il va revenir ! Et moi, qu’est-ce que je vais faire ?! Mais elle gardait les yeux clos. Je tournai alors mon regard désespéré vers le petit garçon, à ses côtés. Un enfant… quel animal pouvait donc s’en prendre ainsi à un enfant ? Je donnai un petit coup de museau sur son front, il ne bougea pas. Il saignait de la tête, et d’une plaie au niveau du torse.

Je tournai alors la tête vers la petite fille, à genoux par terre. Elle ne bougeait pas non plus, mais pas pour les mêmes raisons. Je la fixai de mes yeux que certains qualifiaient d’étranges, avant de reprendre ma forme humaine, à quatre pattes par terre. Elle ne sembla même pas choquée, je ne sais même pas si elle a cligné des yeux.

Ne reste pas là, c’est dangereux ici, fis-je d’une voix que je voulais douce, dont j’essayais de faire taire les tremblements.

Aucune réaction.

Va-t’en ! répétai-je d’une fois plus forte, plus agressive aussi.

Elle battit des paupières, me regarda d’un air effaré, avant de se remettre debout et de s’enfuir à toutes jambes. J’aurais voulu être rassuré, au moins elle était sauvée. Mais je n’y parvins pas. Les jointures de mes doigts devenaient blanches, à force de serrer les poings aussi fort que je le pouvais.

Je baissai à nouveau les yeux vers Azur. Un cri de surprise ; je fus plaqué au sol, à quelques centimètres de son visage, avant même de savoir ce que j’allais faire. Un gémissement rauque et douloureux se fraya un chemin entre mes lèvres. Je tentai de me relever ; en vain. Ce qui s’était écrasé dans le creux de mon dos me maintenait trop fort par terre.

— Allons donc, une petite Aspirante qui vient me priver de l’un de mes petits plaisirs.

Je fus pris d’une quinte de toux nerveuse. Le nez dans la poussière, la poitrine comprimée entre le sol et la masse de la créanne au-dessus, je n’arrivais plus à respirer. Les vagues de chaleur, la panique qui me retournait l’estomac ne m’aidaient pas à réfléchir.

Des petits bruits rapides se firent entendre. Mon regard croisa alors celui d’un assez gros scorpion. J’écarquillai les yeux. Paniqué, l’adrénaline courant dans mon sang, je tentai de me remettre debout ; de me débattre, mon instinct animal prenant un instant le dessus tandis que l’animal se rapprochait. Son dard venimeux brillait au soleil. Je n’arrive pas à me dégager ! J’ai la morphologie d’un gringalet à côté du colosse qui me maintenait par terre ; je ne sais pas comment faire !

J’entendis les pinces claquer. Dans un geste désespéré, je repris ma forme animale, me tortillant de plus belle. Je constatai que la masse au-dessus de moi devint moindre. Je ne pris cependant pas le temps de m’en réjouir ; je me redressai, quoique difficilement. Je claquai des mâchoires face à la créanne scorpion, un grondement dans la gorge. Je ne sais pas si cette espèce me serait réellement dangereuse, mais par réflexe et par instinct je ne pouvais pas me permettre de douter.

Un autre glapissement m’échappa lorsque la créanne reposa, avec un ricanement, son pied sur mon arrière-train, le scorpion se déplaçant toujours vers moi. Azur qui ne bougeait toujours pas non plus… ! Dans une dernière tentative désespérée, pour protéger l’enfant, pour protéger Azur, et pour me protéger moi, je projetai mon esprit vers la créanne scorpion. Cependant, j’eus l’impression de me heurter à un véritable mur. Comme avec les missionnaires. Un échec. Non ! Tout ne pouvait pas être perdu ! Je ne peux pas… je ne peux pas ! La voix floue de l’autre créanne me parvint, difficilement ; un éclat de rire, une phrase qui comprenait « …aspirante…posséder une instable…rire !... ». Je ne pris pas le temps de chercher à comprendre ce qu’il disait, je tentai juste de briser ce mur ; ce mur qui m’empêchait de nous sauver la vie. Je me débattis, j’avais envie de hurler. Je ne savais pas comment faire voler ce mur en éclat. Je ne sais pas ! Je n’ai pas le temps !...

C’était comme si tout mon corps me lançait douloureusement ; enfin, si on pouvait parler de mon corps… mon esprit avait-il vraiment une forme ? Je ne sais pas… à dire vrai tout était tellement flou que je ne savais même pas si j’étais revenu dans mon corps ou si j’étais toujours bloqué au niveau de l’esprit de la créanne. Est-ce que je flotte… ?

Confus et désorienté, le désespoir me gagna à nouveau. Je ne peux pas mourir… je ne peux pas laisser Azur mourir ! Il fallait… je devais trouver quelque chose !... Dans un dernier élan d’énergie, j’essayai de… je ne sais pas trop ? Libérer ladite énergie, je ne sais pas, je fais comme je peux !

Soudainement, tout devint plus net. La vue me revint. Je battis des paupières, un peu surpris de voir soudainement ma forme de renard inerte sur le sol, Azur à côté, Azur… Azur qui commençait à remuer un peu.

Je restai un moment un peu surpris. Cependant, mon esprit, bien plus guidé par l’instinct que la raison, agit pour moi ; toujours dans le corps de la créanne, je vins pour pincer le mollet de son acolyte –manifestement pas très intelligent- qui maintenait toujours mon corps immobile. Avec un grognement suivi d’un regard noir, il recula. En même temps, à la périphérie de mon champ de vision, je vis avec un soulagement et un espoir infinis Azur qui se redressait ; ses yeux écarquillés fixant tantôt mon corps de renard inerte, puis la créanne. Elle était livide.

Son corps s’affaissa un peu, comme elle le faisait quand elle prenait possession de l’esprit de quelqu’un. Son pouvoir de possession était bien plus puissant que le mien, alors… ? La créanne grogna un peu, recula d’un pas encore. Cependant, le corps d’Azur retrouva bien vite de la vie. Elle n’y arrive pas… ? Un gémissement de douleur franchit ses lèvres lorsque dans la foulée elle enserra sa tête de ses mains, tandis que l’autre tombait à genoux. Il avait vaincu Azur et son esprit… jamais je ne l’avais vue perdre ! C’est impossible ! N’y tenant plus, je retirai mon esprit du corps –fort peu agréable- de la créanne scorpion, retrouvant le mien et, dans la foulée, reprendre ma forme humaine.

Azur !

J’aurais voulu hurler, mais ma voix ne fut qu’un gémissement ; un appel désespéré et perdu.

Je tournai la tête vers la créanne, à genoux un peu plus loin. Le scorpion –je l’avais presque oublié- s’était éloigné. Son ami sembla le remarquer et je vis du coin de l’œil Azur laisser retomber ses mains sur ses cuisses, le regard hagard, tandis que la créanne poussait un grognement de mécontentement, manifestement en colère que son acolyte s’en aille. Il jeta un regard dédaigneux à Azur, avant de prendre la forme d’un grizzli et de suivre le scorpion. Ils disparurent peu à peu de mon champ de vision. J’attendis encore un peu, le cœur battant. Une fois assuré qu’ils s’étaient réellement éloignés, je tournai des yeux inquiets vers Azur, mon cœur tambourinant dans ma poitrine, les mains tremblantes. Je voulus lui demander comment elle allait, comment tout ça était arrivé, mais ma respiration saccadée, et mon cœur battant si fort que j’avais l’impression que la moindre parcelle de peau pulsait au même rythme que mon cœur, m’empêchèrent de souffler quoique ce soit. Je me laissai retomber au sol, pantelant et tremblant.

Azur, elle, s’était penchée au-dessus de l’enfant, dont le corps inerte n’avait pas bougé, allongé sur le sol. Elle touchait sa peau, ses blessures. Je m’approchai à mon tour, posai trois doigts au niveau du poignet du petit. Rien. Je ne sentais rien…

Je sentis Azur s’affaisser un peu contre mon épaule. Je tournai la tête vers elle, elle fixait l’enfant, le regard vide.

Comment une telle chose a pu arriver…

Elle posa une main, encore plus blanche que d’habitude, contre ses lèvres, comme pour s’empêcher de crier. Je levai les yeux vers les siens, et je les vis. Toutes ces larmes qui inondaient ses joues. Jamais je ne l’avais vue pleurer. Jamais. Ce qui est arrivé à cet enfant devait la toucher bien plus que n’importe quoi d’autre.

Je lui adressai un regard triste, effleurai doucement ses griffures à la joue. Elle ne tourna cependant pas la tête vers moi.

Jamais je n’avais vu Azur dans cet état. Pour moi elle avait toujours été un modèle de force. La voir dans un tel état me perturbait, et je ne savais pas quoi faire.

Le silence s’abattit, lourd, tandis que je passai mon bras autour de l’épaule d’Azur pour tenter de la réconforter comme je pouvais, tandis que ses larmes silencieuses ne cessaient de couler.


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