Cette fois, je sursaute. Mon coeur tambourine et je lance un regard interloqué à Warren. Avant d'acquiescer.

— Calme-toi, Warren. Je ne partirai pas.

Je me penche à nouveau vers lui pour embrasser chastement son front. Je l'effleure simplement du bout des lèvres.

— Je sais ce que tu en penses. Est-ce que tu crois qu'on pourrait ne pas trop réfléchir, parfois ?

Un petit peu d'interdit dans ce monde qui ne veut pas de nous...? Est-ce que c'est mal ?

Un léger sourire s'étire sur mes lèvres et je pose ma joue contre son crâne, en silence, me contentant d'observer la télé derrière. On a loupé un petit bout de film. Mulan est en train de rejoindre sa troupe - qui l'a reniée, je crois ? je n'ai pas tout vu…- afin de les prévenir que Shan-Yu et ses hommes en ont toujours après l'empereur. Et évidemment, personne ne l'écoute parce qu'elle est une femme…

Nous regardons la fin en silence, et je m'amuse des petites répliques ici et là. "Un barbecue mongol", trop drôle… J'adore ce petit dragon.

Le coup des feux d'artifices me fait rire. C'était bien trouvé, disons. J'imagine que, en désespoir de cause, n'importe quel élément de décor peut devenir une arme.


#N'est-cepas

Un bâillement m'échappe. Le film était vraiment chouette. Et pour une fois, je ne trouve vraiment pas de synonyme pour le remplacer, donc on va rester là-dessus.

— Pourquoi pas, je souris, amusé. Ca me va.

Je m'approche et effleure sa nuque de mon nez.

— Tu peux le dire directement si tu veux que je reste…

Lorsqu'il sort, je me permets quelques secondes pour souffler. Ma main passe sur mon visage, puis je me lève pour préparer le sachet dans la théière. Je me réinstalle sur le lit, couché sur le ventre en l'attendant, et lui lance un sourire lorsqu'il revient faire chauffer l'eau.

— J'ai pris une infusion, le thé vert est un peu trop excitateur pour cette heure.

Enfin, même si fondamentalement, je ne réagis pas beaucoup au thé, j'aimerais éviter. Quand même. Hum.

Un rire m'échappe et je roule sur le dos, glissant ma main sur son bras pour l'effleurer. Mon sourire s'étire et je lui lance un regard mutin.

— Viens le chercher alors, je suis bien comme ça~

Il ne se démonte pas, tiens... Un sourire alors que je me redresse légèrement sur un coude pour l'embrasser moi aussi. Ma main se promène doucement dans son dos et sur son flanc, et je lâche un léger soupir. Je viens mordiller sa lèvre, amusé.

— C'est toi qui veux me corrompre, tu le sais bien…

Mon corps est parcouru de frissons, et je sens une douce chaleur se répandre de ma poitrine à mes membres. Mon visage aussi chauffe ; sa peau paraît presque froide lorsque je m'amuse à le taquiner sous son haut. Je me redresse un peu et enroule mon bras libre autour de ses épaules pour l'amener à se mettre à ma hauteur. Emmêler mes jambes aux siennes. Effleurer son nez du mien, embrasser la bordure de sa mâchoire...

— Alors ne m'accuse pas, vile tentateur~, je m'amuse.

Ses mains et ses lèvres, son souffle contre ma peau... La chaleur monte au fur et à mesure alors que nous sommes un brin empressés. Je crois qu'on se redécouvre, tous les deux. Sous un autre angle, d'une autre manière, et en même temps, c'est toujours entre nous que les choses se passent. Nous nous emmêlons dans les draps, des rires au bord des lèvres et la flamme dans le coeur.

Quand tout retombe, et que nous blottissons sous la couette, j'en profite pour lâcher un long soupir, joue contre sa poitrine.

— Hmm. Je crois qu'on a oublié le thé… je souris, mutin.

Sa main dans mon dos me fait comme un petit massage. J'apprécie l'attention, mais je sens que s'il continue comme ça, je vais simplement finir par m'endormir.

— Non, reste encore un peu, je souffle en fermant les yeux.

Du bout des orteils, je vais taquiner son mollet.

— On a le temps, je lui assure.

Un frisson me parcourt en même temps que je lâche un rire. Je tourne la tête pour poser ma joue contre sa main, avant d'embrasser ses doigts et de lui lancer un regard rieur.

— Eventuellement, hein ? m'amusé-je. Si je ne suis pas fatigué, j'ai le droit aussi ?

A tous les coups, il va faire mine d'être vexé… Il est mignon quand il s'y met, quand même.

Un rire m'échappe et je pose ma main sur la sienne avec un sourire.

— Je reste.

Doucement, je me penche vers lui pour l'embrasser au coin des lèvres et me décide à enfin sortir de ses bras. Je m'extrais difficilement de la couette, sans trop me formaliser de ma nudité dans la pénombre de la pièce. Puis j'actionne à nouveau le bouton de la bouilloire, que nous avons délaissée, et retourne me pelotonner contre Warren.

C'est dans ces moments-là qu'on a l'impression qu'il n'y a pas de guerre, pas de camp à choisir.

Mais peut-être qu'on se trompe.

Les choses changent petit à petit. J'ai l'impression que mes amies créannes bougent, qu'elles cherchent à en savoir plus. J'ai revu Azur récemment ; et, alors que quelques temps plus tôt, j'étais terrorisé par mon implication que je jugeais à la fois inutile et nécessaire, j'ai du trouver en moi les forces qu'il me manquait. Me concentrer sur ce conflit politique m'amène à négliger de plus en plus mon entourage à la congrégation ; mais ce n'est pas par volonté, ni par malice, simplement par oubli, et parce que je n'arrive pas forcément à tout gérer sur le même front.

Ce jour-là, je m'effondre sur mon lit, épuisé. J'ai commencé à faire des recherches pour trouver une maison, un peu à l'écart du reste de la ville, surtout depuis que Warren n'est plus là. Je me sens seul, mais je ne le dirai pas. J'y participe sûrement aussi. C'est de ma faute, mais qu'y puis-je ? Il est humain, et peu importe à quel point il m'est important, peu importe à quel point je me sens démuni, je sais que je ne peux pas attendre de lui – et qu'il ne peut attendre de moi – une patience sans faille.

Mes recherches m'accaparent, et je sais que, bientôt, je n'aurai d'autre choix que d'aller en parler directement avec l'administration de la congrégation... Voire avec les créannes haut placées qui y sont associées.

Mais j'ai peur. Je ne veux pas mourir. Je ne veux pas non plus causer la mort de mes compagnes créannes.

Alors pour le moment, je fais comme si je n'avais pas besoin d'aide, et je m'épuise seul à la tâche.

Quelqu'un frappe à ma porte et je geins légèrement. Je suis perclus de fatigue, j'étais sur le point de m'endormir... Lentement, je roule sur le côté et sors de mon lit. J'essaie de remettre mes vêtements et mes cheveux en place, je ne dois plus ressembler à grand-chose après m'être roulé ainsi dans mon lit.

En ouvrant, je m'attendais plus à tomber sur le visage souriant d'Alexander. A la place, Warren se jette à mon cou. Je titube et pose ma main dans le creux de son dos, à la fois surpris et heureux. Mon cœur bat un peu plus fort et je ferme les yeux un instant, avant de l'enlacer à mon tour.

— Bonjour aussi, je souffle avec un rire.

Cela fait tellement longtemps qu'on ne s'est pas vu, plusieurs semaines au moins ? Ou juste en coup de vent...

Je m'éloigne de lui, un peu mal à l'aise soudain. Mais je suis heureux qu'il soit venu. J'avance ma main vers son visage, effleurant sa joue.

— Je suis surpris de te voir... Tu n'as pas de cours à donner aujourd'hui ?